CHAPITRE IX

L'appartement était plongé dans la pénombre, tous rideaux tirés. Mais la porte de la chambre, restée entrouverte, laissait passer un filet de lumière et le son de deux voix. Lentement, Michael Swain s'approcha de l'embrasure et écouta avec attention : une des voix qu'il entendait était incontestablement celle de Gladys Horton.

« Ainsi, pensa le Swain qui ne rêvait pas, dès que Barbara m'a quitté au restaurant pour rentrer chez elle, elle a aussitôt téléphoné à sa très chère amie, sans doute pour se faire consoler... »

—Incroyable ! disait Gladys ; je he croyais pas befichael capable de se conduire ainsi. Il avait bu, certainement...

—Ce n'est pas une excuse ! répondit la voix de Barbara.

—Remarque, c'est plutôt flatteur, dit Gladys avec un petit rire narquois.

—Flatteur !

—te désire encore après tant de mois de séparation.

—Qu'il me désire ou non, je m'en moque déclara Barbara d'un ton sec ; ce que je n'admets pas, c'est qu'il me le fasse savoir d'une manière aussi... aussi vulgaire. Et à quinze jours de notre divorce, encore !

—Justement. Il a peut-être voulu tenter sa chance une dernière fois... Mais oublie donc cette scène ridicule, chérie. Viens, viens plus près de moi... Je vais chasser le souvenir de ce butor...

Là... Plus près... Embrasse-moi et laisse-toi faire... C'est moi la maîtresse aujourd'hui...

Michael Swain entendit bientôt deux souffles haletants s'élever derrière la porte. Mais il ne ressentit aucun trouble, aucune colère. Tout se passait pour lui dans un monde auquel il n'appartenait pas.

Il ne s'émut pas davantage quand une clé glissa discrètement dans la serrure de la porte d'entrée et n'eut pas un sursaut en voyant une silhouette d'homme se dresser sur le seuil. Malgré la pénombre, il reconnut aussitôt Charles Tunis. Le metteur en scène avait le visage tendu, les yeux fixes. Il demeura immobile pendant un long moment, puis referma silencieusement la porte derrière lui et fit quelques pas en direction de la chambre. Au même instant, un gémissement aigu s'éleva de l'autre côté du battant et une voix haletante supplia : —Oh! Chérie ! Oui... encore... encore...

Tunis bondit, ouvrit la porte en grand et hurla : Ainsi, c'était donc vrai, espèce de salopes !

Michael Swain se glissa derrière lui et aperçut, sur le lit, les deux jeunes femmes plus qu'à demi dévêtues. La tête de Giadys était plongée entre les cuisses de Barbara. En entendant Tunis, elles se séparèrent vivement et tentèrent de remettre un peu d'ordre dans ce qu'il leur restait de vêtements.

—Oh! inutile, gronda le metteur en scène ; j'ai vu tout ce que je voulais voir!

Barbara fut la première à réagir.

—Qu'est-ce qui t'a permis d'entrer ainsi chez moi ? demanda-t-elle d'un ton outragé; comment t'es-tu procuré les clés de mon appartement ?

—Les détectives privés ne sont pas faits pour les chiens ! ricana Tutus; et celui qui vous suit, toutes les deux, depuis un certain temps déjà, connaît son métier!

—Je porterai plainte ! cria la jeune actrice.

Tullis eut un rire grinçant.—Je l'espère bien ! s'exclamat-il ; cela va faire un procès du tonnerre ! Les journalistes vont se jeter là-dessus comme des dogues sur un quartier de viande ! Je vois d'ici les titres dans la presse : « L'actrice Barbara Bax ter surprise par son amant dans les bras de... sa maîtresse » Je serai sans doute ridicule mais toi, tu seras répugnante. Et je peux te garantir que ta carrière est fichue. Tu ne pourras plus apparaître sur une scène sans que quelqu'un ne se lève dans la salle en criant : « Tiens ! Voilà la gouine ! »

Le beau visage de Barbara se convulsa. Elle se dressa sur le lit en désordre et tendit le bras vers la porte.

-Va-t'en ! hurla-t-elle ; et ne remets plus jamais les pieds ici, pauvre type ! Quant à remuer de la boue, c'est un jeu qui se joue à deux, mon petit Charles ! Et les journalistes dont tu parles seront certainement enchantés d'apprendre nos secrets d'alcôve et certaines de tes... particularités.

Si tu veux le scandale, tu l'auras, mon bonhomme ! Mais tu en sortiras aussi sale que moi. Et maintenant, dehors !

Michael Swain vit le metteur en scène serrer les poings et faire un pas vers Barbara. « Est-ce à présent qu'il va la tuer ? se demanda-t-il; pas devant Gladys, tout de même... » Mais, déjà, Tullis perdait son attitude menaçante. Il ouvrit la bouche, balbutia quelques syllabes incompréhensibles puis tourna les talons et s'enfuit. La porte de l'appartement claqua.

Le rire narquois de Gladys monta dans la chambre.

Ah! la jolie scène ! s'exclamat-elle; et comme j'aurais voulu que ce soit Michael qui soit là, et non Charles !

—Il n'y a pas de quoi rire ! dit sèchement Barbara en se levant et en se rhabillant; tu es tout à fait inconsciente, ma pauvre Gladys. Il est vrai que, toi, tu n'as pas une réputation à perdre...

Le rire de Gladys s'interrompit net et une lueur de colère passa dans ses yeux verts.

—Oh ! que voilà une phrase méchante dans la bouche de quelqu'un qui, il y a un instant, me disait des choses si passionnées ! murmura-t-elle.

Tu es vraiment inconsciente, répéta Barbara avec aigreur; c'est vrai ce qu'a dit Charles : si le scandale éclate, ma carrière est fichue... et, pour mon rôle de Desdémone, je peux aussi bien le rayer de mes carnets !

—Prends un autre metteur en scène, dit Gladys en haussant les épaules.

—C'est ça ! Pour que toute la salle éclate de rire quand j'aurai une scène d'amour avec Othello ! s'exclama Barbara.

Elle donna un coup de poing rageur dans l'oreiller qui se trouvait près d'elle.

— Ah! bon Dieu ! Qu'est-ce qui m'a pris ?

gronda-t-elle ; oui, vraiment, qu'est-ce qui m'a pris de me laisser aller ainsi à cette aventure stupide ?

Gladys, qui s'était entièrement rhabillée, ramassa un foulard qui traînait sur un fauteuil et s'approcha de l'actrice.

— Fais attention à ce que tu es en train de dire, ma chérie, murmura-t-elle d'une voix rauque ; tu ne l'as pas toujours trouvée stupide, cette aventure. Souviens-toi de toutes ces fois où tu te traînais à mes pieds en me suppliant de te caresser encore, et encore... Et il y aurait bien d'autres choses à révéler au public. Nous aussi, nous avons nos secrets d'alcôve, ajouta-t-elle avec un rire de défi.

Barbara la regarda fixement, d'un air presque haineux.

Va-t'en, toi aussi ! lança-t-elle ; je maudis le jour où je t'ai rencontrée, où je me suis laissée entraîner à ces... jeux dérisoires, ce que tu appelles nos secrets d'alcôve. Mais prends garde, Gladys ! Si tu parles, je parlerai aussi, et pas pour colporter des ragots de femme de chambre renvoyée! Pour dire ce que je sais de tes trafics de drogue, de la manière dont tu en vends à des épaves comme toi pour pouvoir t'acheter tes doses... Et ça, ma belle, ce ne sera pas le scandale, mais la prison, tout de suite et pour pas mal d'années. Tu vois que tu as intérêt à...

Le reste de sa phrase se perdit dans un râle sourd. D'un bond, Gladys venait de sauter sur l'actrice, lui entourait le cou du foulard qu'elle tenait à la main et serrait de toutes ses forces en sifflant : —Ah! tu le prends ainsi, ordure ! Tu me traites d'épave, de femme de chambre renvoyée...

Barbara tomba à la renverse sur le lit, porta les mains à sa gorge et tenta désespérément de desserrer l'étoffe qui l'étranglait. Gladys s'était mise à genoux sur sa poitrine et continuait à serrer avec un gloussement satisfait.

« Est-ce qu'elle va la tuer ainsi ? se demanda Michael Swain ; ce serait donc Gladys la coupable ? Et, une fois son crime commis, elle vient me voir, prétendument pour me consoler, en réalité pour me révéler sa liaison avec Barbara ? Je n'arrive pas à y croire... D'ailleurs, ça ne colle pas avec les faits. N'y a-t-il pas eu tentative de viol ? »

Pourtant, sur le lit, les gestes de Barbara devenait mous, hésitants, son visage avait pris une teinte violette, ses yeux lui sortaient de la tête.

—C'est bon, chérie ? souffla Gladys en se penchant sur elle; on dit qu'il y a des gens qui prennent leur pied ainsi... Tu veux essayer ? Tu veux que j'aille jusqu'au bout ? Une petite minute encore et tout sera fini pour toi... Mais non, pas si bête !

Elle arracha soudain le foulard et se redressa: —Je veux que tu vives, Barbara, dit-elle avec un sourire haineux ; que tu vives pour déguster chaque minute du scandale qui va éclater, pour savoir ce que c'est qu'une idole tombée de son socle.

Barbara demeura inerte. Puis, soudain, elle releva la tête, la pencha de côté, toussa, cracha et se mit à vomir sur l'oreiller voisin. Gladys partit d'un grand rire.

— La voilà, la photo du siècle ! s'exclamat-elle ; la grande Barbara Baxter en train de souiller son lit comme une femme soûle ! Je vais te laisser faire ta toilette tout à son aise, ma chérie, reprendre son souffle et réfléchir à ce qui t'arrive.

Mais souviens-toi...

Elle passa lentement une extrémité du foulard sur la gorge tuméfiée.

Un mot, un seul, sur notre liaison et ce que tu appelles mon trafic de drogues et, cette fois, tu y passeras ! Adieu, mon bel amour. Je vais désormais consacrer mes journées à lire la colonne des potins dans les journaux spécialisés.

Dès qu'elle fut sortie de la chambre, Michael Swain vit Barbara se soulever péniblement, sortir du lit et se diriger en titubant vers la salle de bains.

« Donc ce n'est ni Tunis ni Gladys qui l'ont tuée, se dit le romancier; alors qui ? Moi ? Vais-je me voir entrer dans cette chambre et assister à ce meurtre que, pourtant, je suis certain de ne pas avoir commis ? Impossible ! Mon rêve précédent ne correspond pas à celui-ci... A moins que les rêves n'aient leur vie propre et ne se modifient à leur gré... »

Barbara revenait, vêtue d'une longue robe de chambre de soie. Son souffle était encore rauque et haletant mais elle semblait avoir recouvré ses esprits. Elle arracha les draps du lit, enleva les taies d'oreiller, les remplaça par d'autres et s'étendit en portant les mains à sa gorge. Brusquement, elle se mit à pleurer en silence, le corps secoué de frissons. Michael la regarda avec un détachement total. Cette femme qu'il avait tant aimée, que, dans une certaine partie de lui-même, il aimait peut-être encore, lui paraissait appartenir à un autre monde où tout ce qui pouvait advenir le laissait indifférent.

Il n'eut pas un sursaut quand il entendit la porte de l'appartement s'ouvrir une fois de plus, ni quand un pas s'approcha de la chambre. Barbara, elle, avait redressé la tête et regardait devant elle avec terreur.

—Qui est-ce encore ? demanda-t-elle d'une voix éraillée.

—C'est moi, Andrew, répondit quelqu'un dans un murmure.

Michael ne fut pas le moins du monde surpris de voir la petite silhouette malingre du docteur Gibbson se dresser sur le seuil de la chambre.

—Andrew s'exclama l'actrice ; qu'est-ce que tu fais là ? Qu'est-ce que tu veux ?

—Rien de plus que te voir et te parler, dit le médecin en s'approchant du lit; mais toi, Barbara, que t'arrive-t-il ? Tu as l'air malade, abattue... A moins que tu n'attendes quelqu'un... Ces rideaux tirés, cette lumière tamisée, cette robe de chambre...

—Je n'attends plus rien, plus personne et certainement pas toi, gémit l'actrice en pressant ses mains contre ses tempes; comment es-tu entré ?

—J'ai fait faire des clés, expliqua Gibbson, l'air mal à l'aise.

—Toi aussi ! Décidément, les fabricants de fausses clés sont très à la mode, en ce moment, dit Barbara d'un ton sarcastique ; et je suppose que, comme d'autres, tu me fais suivre par des détectives privés...

—Je ne t'ai jamais perdue de vue depuis que tu m'as quitté pour épouser Michael Swain, répondit Gibbson d'une voix blanche ; je t'ai toujours aimée, Barbara, et je t'aime encore, malgré... tout.

Un souvenir jaillit dans la mémoire de Michael Swain. « Barbara m'avait dit qu'elle avait été la maîtresse d'un médecin avant de me rencontrer, pensa-t-il; mais elle ne m'a pas donné son nom.

Le fait que Gibbson ait ensuite quitté sa clinique pour venir s'enterrer à la campagne et, comme par hasard, non loin de chez moi, qu'il m'ait soumis à ses diverses expériences sur la création romanesque et le rêve, tout cela doit avoir un sens... »

—Aimer, aimer... Ce que je peux être dégoûtée de l'amour! soupirait Barbara.

Le médecin fit un pas de plus vers le lit, s'assit sur le bord et prit entre les siennes une main que la jeune femme retira aussitôt.

—Parce que tu t'es laissé séduire par des êtres qui ne pouvaient rien t'apporter, dit-il avec une étrange douceur; Michael Swain n'aimait que lui à travers toi ; cette lesbienne, Giadys Horton, voulait, en te convertissant à ses moeurs, essentiellement se venger de Michaei. Quant à Charles Tunis, ce qu'il aime chez toi, c'est l'actrice qui lui permettra de faire une superbe carrière de metteur en scène. Tous ces gens ne sont que des illusions, Barbara, des chimères.

—Et toi, Andrew, tu étais une réalité ?

demanda l'actrice en se soulevant sur un coude et en fixant sur le médecin un regard irrité; toujours perdu dans tes recherches, tes consultations, tes fiches, tes appareils...

—Cela ne m'empêchait pas de t'aimer.

Barbara eut un rire moqueur.

Je pense bien ! Tu m'aimais au point de vouloir faire de moi le sujet de tes expériences !

—Je voulais te révéler à toi-même. C'est grâce à ce que tu appelles mes « expériences » que tu es devenue l'actrice que tu es, Barbara.

—Allons donc !

Michael Swain vit le visage du médecin se contracter.

—Tu refuses cela aussi ? demanda-t-il amèrement.

La jeune femme se redressa tout à coup. Les pans de sa robe de chambre s'écartèrent, révélant en partie son buste splendide. Mais elle ne parut pas y prendre garde.

Désormais, je refuserai tout, Andrew ! Tout et tous ! Toi, Michael, Gladys, Charles... Au diable ! Vous ne m'avez apporté que des ennuis et des angoisses ! A partir de maintenant, je veux être une femme seule, et libre ! Dis-moi ce que tu es venu me dire, puisque tu es là, et puis va-t'en!

Je n'ai vu que trop de monde aujourd'hui !

Gibbson rougit soudain.

—Tu n'as pas le droit de me parler sur ce ton!

répliqua-t-il avec véhémence ; j'ai fait pour toi plus que quiconque au monde... et je suis prêt à t'aider encore.

—M'aider en quoi ?

—A développer ton talent qui est, de toute évidence, arrivé à un point de blocage.

—Un point de blocage ! s'exclama Barbara dans un sursaut qui la dénuda un peu plus; ce n'est pourtant pas ce que disent les critiques ni le public !

—lis le diront bientôt si tu n'y prends pas garde, Barbara ; tu possèdes remarquablement ton métier mais tu as atteint un palier et tu ne parviens pas à passer au stade supérieur. La preuve : les conflits incessants qui t'opposent à Tuilis à propos de ton rôle de Desdémone.

La jeune femme fronça les sourcils.

—Tu es au courant ? murmura-t-elle.

—Je suis au courant de beaucoup de choses, répondit le médecin ; et je connais le moyen de faire disparaître l'obstacle qui te freine.

Barbara dévisagea longuement son visiteur.

Puis elle eut un sourire ironique.

—Je suppose que, ce moyen, tu ne me le donnerais qu'à certaines conditions, dit-elle.

Le médecin baissa la tête.

A une seule condition, Barbara : c'est que tu reviennes vivre avec moi. Tu seras bientôt divorcée et je suis prêt à t'épouser aussitôt après.

Le rire de l'actrice fut si aigu, si prolongé, qu'il en devint insupportable. Michaei Swain vit le visage de Gibbson virer au pourpre et ses poings se crisper.

—Vivre avec toi ! s'écria l'actrice ; et devenir ta femme ! Mais, Andrew, si je ne te connaissais pas, je dirais que tu es ivre ! Tu as donc complètement oublié certains petits problèmes qui se posaient entre nous ? Tu étais déjà bien fatigué quand je t'ai rencontré, mon pauvre Andrew, et cela n'a pas dû s'arranger depuis... Dois-je être plus précise?

-Inutile f gronda le médecin ; je sais que je ne te satisfaisais pas... Mais, dans ce domaine aussi, je puis trouver une solution...

—A l'aide de tes appareils ? demanda Barbara avec une expression goguenarde ; nous ferons l'amour bardés d'électrodes, c'est cela ? Et tu me mettras un bandeau sur les yeux pour que je ne voie pas ton visage grêlé et tes yeux louches lorsque tu t'étendras sur moi ?

—Barbara, je t'en supplie, murmura Gibbson, le front moite.

—Ah ! Et puis tu transpires beaucoup dans ces moments-là, j'avais oublié ce détail, continua l'actrice ; écoute, Andrew, puisque nous avons abordé ce sujet délicat, allons jusqu'au bout : pendant tout le temps où j'ai vécu avec toi, pas une fois, tu m'entends, pas une seule fois tu ne m'as donné du plaisir!Le médecin poussa un cri de rage et, se penchant, saisit la jeune femme par les poignets.

Ce n'est pas vrai ! gronda-t-il ; il y a eu des soirs... Je t'ai vue, je t'ai entendue...

—Ce qui prouve que je suis vraiment une excellente actrice, répliqua Barbara d'une voix dure ; et que, toi, tu n'es peut-être pas un aussi bon psychiatre que tu te l'imagines ! Maintenant, lâche-moi, tu me fais mal... Andrew ! Qu'est-ce que tu fais ? Qu'est-ce que tu prétends faire ?

Le petit homme venait de se jeter sur elle, arrachait sa robe de chambre, tentait de l'immobiliser sous son poids et d'écarter ses jambes.

Barbara se débattit un instant puis cessa de bouger et regarda Gibbson avec un sourire de mépris.

—Tu vois ce que je veux dire, Andrew ?

ricana-t-elle; tu n'es même pas fichu de me violer!

—Mais je suis capable de te faire taire, maudite garce ! hurla le médecin.

De ses deux mains tendues, il agrippa le cou de la jeune femme et se mit à serrer. Barbara poussa un gémissement étouffé et essaya de se débattre.

Mais, les traits déformés par une grimace hideuse, Gibbson accentua sa prise en répétant : —Garce ! Garce ! Garce !

Il y eut un craquement écoeurant. Les yeux de Barbara se révulsèrent, sa tête roula sur le côté et elle demeura immobile. Le médecin se redressa lentement sans la quitter des yeux. Puis, d'une voix presque inaudible, il chuchota : —Désormais, tu ne joueras plus la comédie à personne, Barbara...

Et il s'enfuit de toute la vitesse de ses petites jambes.